J'avais prévu d' écrire sur le système de mutuelle et de poster mes photos d'assemblées générales de mutualistes dans les campagnes perdues du centre du pays. Je dois encore vous expliquer ma folle escapades dans les contrées congolaises...
Mais pas de photos, et pas de "comment ça marche au Burundi...quelle expérience super" etc..."! Non! Encore une fois, pour le film Bang for Your Buck, j'ai démontré mes grands talents de Public Relations! En effet, après interviewé une dizaine de victimes de grenades ou de kalashnikovs, nous avions besoin d'un marchand d'armes, un vrai!
Officiellement, le pays est tout à fait désarmé. En réalité, on sait tous que le pays est encore rempli de stock et que l'acheminement par le Congo et la Tanzanie existe! Mais au delà, des dimensions "internationales", nous, on avait besoin de l'intermédiaire entre ces "pays", l'international et la rue. D'un mec qui met entre les mains des enfants des vrais AK-47 pour tirer sur les passants et qui leur apprend à jongler avec des grenades!
Mission Impossible? Cela m'a pris en tout et pour tout une après midi! Ca m'a d'abord pris 5 minutes de courage pour expliquer ce que je recherchais à un des chauffeurs du ministère. Ca m'a ensuite pris 10 minutes pour qu'il m'explique comment, en tant que tutsi, il défendait son ethnie, et son quartier, armé jusqu'aux dents en dressant les barrages ou en patrouillant dans les rues...A 14 ans!
La grande question ensuite: -"Et qui t'as donné ton arme?"
-J-P, il est comme mon grand frère!
- Quoi? ca veut dire que tu le vois encore? Est-ce que tu crois que je peux le rencontrer!
-Ca dépend, je vais prendre contact avec lui, et puis je te dis quoi...
4h après, on avait son accord, il attendait plus qu'un coup de téléphone pour savoir où on pouvait le rencontrer.
Aujourd'hui, donc pour déjeuner...Mon marchand d'armes!
L'homme arrive avec 45 min de retard, donc à l'heure...Il est plutôt grand, et quand il me serre la main, je recompte mes doigts. Habillé comme un peintre en bâtiment, Jean-Pierre assez atypique. Les dents de devant ont disparu, mais il parle vite, interrompt ce qui est encore plus rare au Burundi, et il est très sur de lui : "Je suis l'homme qu'il vous faut".
Off record, il explique comment il recevait les armes des rebelles congolais, comment il achetait les mitraillettes des Hutus rwandais en fuite mourant de faim et sans habit.
Maintenant que la guerre est finie, il a pu conserver certaines armes, un peu de tout. Son business est plus que florissant.
Demain et ce week-end il part à l'intérieur vendre ses armes aux rebelles qui se regroupent au Nord du pays. Il m'a proposé de venir pour filmer...Papa, Maman; j'ai refusé!
Voilà, il y a un an, j'ai pris une giffle pour prétendre vendre des armes (si, si...si vous ne connaissez pas cette histoire, demandez là moi, j'adore la raconter!). Aujourd'hui, je les rencontre! Et finalement, "sa petite entrepriiiiiiise, connaît pas la criiiiise!"